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Le travail invisible : ce que les femmes font et que personne ne voit… jusqu’au jour où elles arrêtent

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À la maison, il y a des choses qui semblent exister toutes seules : le rouleau de papier toilette toujours plein, les chaussettes propres qui apparaissent comme par magie dans l’armoire, le pain qui ne manque jamais au petit-déj, les boîtes à tartines qui retrouvent mystérieusement leur place. On pourrait croire à une bonne fée du logis. Sauf que cette fée, cest « maman »

Cette situation vous est familière? A moi aussi… Jusqu’il y a peu. Et puis, il y a eu mon épuisement, et cette grossesse qui a changé beaucoup ( Ah, oui, peut-être que tu ne le sais pas – si tu ne me suis pas sur les réseaux – mais j’attends un bébé pour l’hiver 2025 ). Pas une grossesse “Pinterest”, où tu poses en robe fluide dans un champ de blé. Non, une grossesse qualifiée “à risque”, avec hypertension, vomissements en série, problèmes articulaires et médicaments à surveiller. Une grossesse où, très vite, j’ai dû ralentir. Et quand j’ai levé le pied, tout le monde a vu… ce qui ne se faisait plus.

Parce que soyons clairs : entre deux vomissements, il y avait comme un diktat inconscient que je redevienne “opérationnelle”. Que je reprenne, presque naturellement, tout ce que je faisais d’habitude. Mais je n’ai pas pu. Et là, ça a coincé. Mon mari s’est retrouvé à gérer plein de choses, les enfants aussi. Et très vite, j’ai entendu :  » Ah mais c’est le bazar ici », « Pourquoi mon jogging n’est pas lavé », “Oh Mais elle ne tourne plus cette maison !”

C’est exactement à ce moment-là que la lumière s’est faite : tout ce que je faisais avant, sans jamais qu’on s’en rende compte, avait un nom. Ça s’appelle le travail invisible.

Quand le quotidien dépend du travail invisible des femmes

Le travail invisible, c’est tout ce qu’on fait en silence pour que la maison tourne: anticiper les courses, penser aux rendez-vous médicaux, vérifier qu’il y a toujours du papier toilette, prévoir les goûters, laver les boîtes à tartines, acheter un cadeau d’anniversaire pour l’ami de classe, rappeler que demain il y a sport, glisser une lessive parce que le jogging préféré est sale… La liste est infinie. Et la plupart du temps, personne ne le remarque.

Chez nous, au départ, ce manque a créé des tensions. Mais il a surtout ouvert un débat. J’ai pu dire : “Vous voyez, ça, c’est tout ce que je faisais avant. Vous trouvez ça lourd aujourd’hui ? Mais c’est mon quotidien depuis toujours.” Et là, ma famille a compris. Ou du moins, ils ont entendu.

Je dis souvent que je ne veux pas dire que j’ai de la chance, parce que ce soutien devrait être normal. Mais il faut reconnaître qu’aujourd’hui, mon mari et mes enfants ont intégré que ce bébé allait agrandir notre famille, et que donc, la grossesse était l’affaire de tous. (enfin, surtout de mon mari et moi). Résultat : ils prennent le relais, ils s’occupent de la maison, ils s’assurent que je vais bien, que je n’ai besoin de rien. Et ça, c’est précieux.

Mais toutes les femmes n’ont pas cette réalité

Et c’est là que je veux insister : toutes les femmes n’ont pas la possibilité de poser ce fardeau. Certaines n’ont pas de conjoint impliqué, ou vivent avec quelqu’un qui ne reconnaît pas ce travail invisible. Parfois, en parler mène à un mur, ou pire, à des reproches, de la culpabilisation, voire à des violences psychologiques. D’autres encore continuent à tout porter parce qu’elles sont conditionnées à le faire, parce qu’elles ont peur d’être jugées, ou parce qu’elles ne veulent pas “laisser tomber” leur famille.

Le travail invisible devient alors un engrenage. On le fait même quand on est épuisée, malade, enceinte, en burn-out. On le fait parce qu’on se sent obligée, parce que c’est “notre rôle”. Et le prix est énorme : fatigue chronique, sentiment d’injustice, frustration, perte de confiance en soi… et parfois effondrement complet, rétablissement plus compliqué.

Comment alléger ce poids ?

Alors bien sûr, je n’ai pas de solution miracle, mais voilà quelques pistes qui m’aident :

  1. Mettre des mots. En parler, c’est déjà rendre ce travail visible. Avec son conjoint, ses enfants, une amie, une sœur… Peu importe. Mais nommer, c’est reconnaître.
  2. Déléguer, même si ce n’est pas parfait. Oui, ça pique de voir les patates épluchées en mode Picasso, ou le linge plié façon boule. Mais ce n’est pas grave. Différent, ce n’est pas raté.
  3. Demander de l’aide. Pas seulement au conjoint. Une amie, une voisine, une autre maman d’école. On oublie trop souvent que la solidarité existe.
  4. Accepter d’en faire moins. Spoiler : le monde continue de tourner même si les serviettes ne sont pas repassées. Personne n’a jamais eu un trauma d’enfance à cause d’un t-shirt un peu froissé.
  5. Réfléchir à son environnement. Est-ce que je suis dans une famille, un couple, un entourage où je peux me sentir soutenue ? Parce qu’au fond, la famille, ce n’est pas seulement partager un toit, c’est aussi s’entraider.

Conclusion : rendre visible l’invisible

Le travail invisible est lourd parce qu’il est silencieux. Parce qu’il est fait comme si c’était “normal”. Mais il ne l’est pas. Et si tu lis ces lignes en te reconnaissant, rappelle-toi : tu as le droit de dire stop. Tu as le droit de demander du relais. Tu as le droit d’être fatiguée, malade, ou juste de ne pas avoir envie.

Si c’est le jour où on arrête, tout le monde s’en rend compte, c’est souvent tard. Alors autant en parler avant, pour éviter que ce soit vécu comme un choc. Et surtout, pour rappeler que prendre soin de soi, c’est aussi prendre soin de sa famille.

Parce qu’une maison ne repose pas seulement sur des lessives, des courses et des rendez-vous bien orchestrés. Elle repose d’abord sur une femme, une mère, une personne. Et cette personne mérite d’exister autrement qu’à travers ce qu’elle fait en silence.


Liste (non exhaustive) du travail invisible

  • Penser à vérifier les stocks : papier toilette, savon, dentifrice, goûters…
  • Anticiper les courses et faire les listes.
  • Préparer les affaires de sport, les pique-niques, les anniversaires d’école.
  • Gérer les rendez-vous médicaux (médecin, dentiste, pédiatre…).
  • Rappeler aux enfants leurs obligations (“Prends tes clés ! Ton maillot ! Ton carnet !”).
  • Coordonner les horaires de chacun (trajets école, activités, rendez-vous).
  • Lancer les lessives “urgentes” pour les tenues préférées.
  • Ranger, trier, retrouver les objets perdus (“Mamaaaan, il est où mon sweat ?”).
  • Penser aux cadeaux, aux cartes, aux inscriptions scolaires ou sportives.
  • Servir de calendrier vivant, d’assistante personnelle et de GPS émotionnel pour toute la famille.

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